Airbus veut profiter des nouvelles ambitions militaires du Canada

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Mathieu Carbasse


L’avionneur européen souhaite aider le Canada à consolider ses capacités existantes et à gagner en souveraineté.

Si les budgets et la politique industrielle du Canada en matière de défense doivent encore être précisés dans les semaines et les mois à venir, Airbus compte bien profiter du momentum pour tirer son épingle du jeu.

De passage récemment au Canada, le patron des activités spatiales et de défense d’Airbus, Jean-Brice Dumont, a discuté avec Le Devoir des ambitions de l’entreprise européenne à la lumière des nouvelles orientations canadiennes.

« Il va y avoir des perspectives pour Airbus et pour le Canada, dans tous nos champs d’application militaire, que ce soit pour solidifier les flottes existantes ou pour les besoins du NORAD [le Commandement de la défense aérospatiale de l’Amérique du Nord], qui pourraient être appelés à évoluer, résume-t-il. C’est au gouvernement du Canada de décider. Nous, on est prêts à aller plus loin. »

Parmi les éléments cités par le directeur de la division Air Power au sein d’Airbus Defence and Space figure notamment l’hélicoptère d’entraînement H135, dont l’Aviation royale canadienne a acquis dernièrement 19 exemplaires. Assemblés à Fort Erie, en Ontario, les appareils commenceront à être livrés à la mi-2026. M. Dumont pense que la nouvelle enveloppe budgétaire pourrait permettre de rehausser à terme le nombre d’hélicoptères achetés par Ottawa.

Dans un contexte mondial marqué par le besoin des pays d’affirmer leur souveraineté sur tout leur territoire, M. Dumont juge aussi particulièrement important le secteur du transport stratégique, de troupes et de matériel.

 


« Le Canada n’a pas exprimé explicitement de besoin, mais on sait que ça fait partie des sujets qui vont être sur la table », avance-t-il.

Jean-Brice Dumont

Photo: Peter Dejong Archives Associated Press Jean-Brice Dumont

Pour y répondre, Jean-Brice Dumont met de l’avant l’A400M, un avion capable de transporter jusqu’à 37 tonnes de fret sur 4500 km. Il cite aussi le CC-330 Husky, dont Ottawa a acheté neuf unités pour soutenir le NORAD en 2023. Chargés du ravitaillement en vol, ces appareils peuvent aussi être affectés à des missions de transport stratégique de passagers et aux évacuations médicales. Les premiers devraient être livrés à partir de 2027, et l’ampleur de la commande pourrait être revue à la hausse.

Enfin, le secteur de l’espace, avec l’observation et la communication par satellite, est aussi un domaine dans lequel Airbus pourrait profiter des budgets actuels, selon M. Dumont.

Aider le Canada à gagner en souveraineté

Sur le plan de la souveraineté militaire, Airbus souhaite permettre au Canada de cadrer dans le contexte nord-américain tout en bénéficiant d’une certaine autonomie.

« La souveraineté, c’est la capacité à décider qu’on peut, à un moment donné, vivre sa vie. Ce n’est pas une opposition à l’alliance nord-américaine. On est prêt à en discuter activement avec le gouvernement du Canada et avec le ministère de la Défense, parce qu’il y a un intérêt réel », souligne le directeur des activités spatiales et de défense d’Airbus.

 

Selon lui, évoluer dans une « bulle fermée » en matière de défense peut d’ailleurs s’avérer contre-productif. Jean-Brice Dumont pointe l’avion de chasse américain F-35, dont le Canada s’est engagé à acheter 16 appareils, les 72 autres appareils de la commande initiale étant encore à l’étude par le gouvernement.

Avec le système des F-35, les États-Unis ont créé une bulle en matière d’échange de données, explique-t-il. Ainsi, un F-22 ne peut pas communiquer avec un F-35. Il suggère donc au pays de favoriser des systèmes qui soient interopérables, mais qui permettent aussi le fonctionnement en vase clos. Ce qui est bien plus facile à dire qu’à faire, convient-il toutefois.

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